Engagement politique

La réforme du secteur de la sécurité (RSS) est fondamentalement politique, car elle traite des relations de pouvoir entre divers acteurs étatiques et non étatiques, ainsi que de leurs prérogatives de recours à la force. Cela est d’autant plus vrai que la RSS est également liée à la responsabilité de ces acteurs d’assurer que les valeurs fondamentales de liberté, sécurité et droits de l'homme soient respectées. Il est pour cela essentiel que les responsables politiques adhèrent aux réformes de sécurité et justice et qu’ils se les approprient afin que ces processus de réforme soient un succès. 

Il est donc important que la priorité pour les donateurs partenaires soit de construire et maintenir l’engagement politique afin que le processus de réforme soit durable. On rencontre souvent trois défis clés: 1) convertir une forte volonté politique en une stratégie claire pour lancer des réformes; 2) gérer des niveaux variables de volonté politique pour s'engager dans le processus RSSJ; 3) relancer, inciter ou réorienter l'intérêt politique et l'engagement, lorsque la volonté politique [1] se concentre ailleurs.

Les leçons suivantes peuvent aider à aborder ou réduire ces défis.

Leçon 1 Développer et maintenir le dialogue politique 

Leçon 2 Confiance et collaboration avec les partenaires locaux 

Leçon 3 Les accords officiels aident à créer et renforcer l'engagement politique

Quelques sources

Leçon 1 – Développer et maintenir le dialogue politique 

Un dialogue politique de qualité aide à établir et maintenir la dynamique nécessaire dans les programmes de réforme. Echanger sur des questions politiques, plutôt que sur des questions moins conflictuelles ou des aspects techniques des programmes, est nécessaire pour, d'une part, avoir une idée de la volonté politique et, d'autre part, augmenter progressivement l'engagement politique.

Exemples

Mise en œuvre de la Déclaration de Paris au Mozambique

La mise en œuvre de la Déclaration de Paris a été testée pendant près d’une dizaine d’années au Mozambique, dans le cadre d’une responsabilité mutuelle donateurs/gouvernements conçue autour d’un processus de suivi annuel du budget. Les donateurs et le gouvernement reconnaissent que les progrès réalisés résultent d'un dialogue politique continu et de qualité. Parmi les leçons tirées du processus figure la nécessité d'inclure un développement politique efficace au niveau sectoriel et thématique dans le dialogue politique, et d'accorder plus d'attention à l'élaboration d'indicateurs de manière à évaluer correctement la mise en œuvre des mesures de gouvernance.

Commission internationale contre l’impunité au Guatemala (Comisión Internacional contra la Impunidad en Guatemala, CICIG) 

Après une naissance compliquée, la Commission internationale contre l'impunité au Guatemala (CICIG) a été confrontée à un environnement politique difficile. L'amélioration de la relation entre la CICIG et le bureau du Procureur général du Guatemala reposait non seulement sur le renforcement des capacités et l'assistance technique, mais aussi sur le soutien politique et public aux responsables du Bureau du Procureur.

Leçon 2 – Confiance et collaboration avec les partenaires locaux

La confiance et la collaboration avec les partenaires locaux aident à créer une volonté de s'engager dans les processus RSSJ. La confiance favorise un environnement propice tout en encourageant l'engagement politique pour appuyer le programme, et peut être consolidée par une tierce partie ayant la confiance des deux partenaires. La transparence et l'accès à l'information facilitent également le développement de la confiance avec les partenaires locaux tout au long du cycle du projet.

Exemples

Réforme policière et judiciaire au Mozambique

Les donateurs et le gouvernement du Mozambique étaient tous deux désireux d'impliquer le PNUD dans le programme de réforme de la police. Du point de vue des partenaires, il était important de réduire les risques, de mettre en commun les ressources et de choisir une agence qui satisferait à leurs normes financières, de suivi et d'évaluation. Du point de vue du gouvernement, il était important que l’organisation soit un interlocuteur facilement accessible tout au long de la mise en œuvre et qu'elle puisse mobiliser des experts qualifiés et des responsables de programmes capables de fonctionner tout en respectant sa souveraineté.

Lalá, A., and Francisco, L. (2008). The Difficulties of Donor Coordination: Police and Judicial Reform in Mozambique. In Managing Insecurity: Field Experiences of Security Sector Reform (pp.77-94), eds. G. Peake, E. Scheye and A. Hills, Routledge, Abingdon / New York.

Programme de paix et sécurité Zimbabwe (ZPSP)

Construire la confiance dans le contexte difficile du ZPSP a été possible grâce à une combinaison de facteurs, notamment les compétences spécialisées en médiation de la direction du programme, la qualité du contenu et les efforts continus pour construire une relation entre le ZPSP et l'État, ainsi que les acteurs de la sécurité non-étatiques.

Soutien des Pays-Bas au programme DSS au Burundi

La participation des interlocuteurs burundais dès le début du programme a aidé à établir une relation de confiance. Les premiers objectifs à court terme, tels que la formation et le matériel, ont renforcé la confiance et l'expérience, qui à leur tour ont renforcé la confiance pour des objectifs de plus en plus stratégiques dans les phases ultérieures du programme (OCDE: 34,50). Il y avait en outre une relation étroite et quotidienne entre le responsable politique de l'ambassade des Pays-Bas et le responsable du programme, un professionnel international indépendant en relation avec les parties prenantes néerlandaises et burundaises. À ce titre, il s'est concentré sur la réalisation des objectifs du programme conjoint plutôt que sur l'agenda politique des donateurs (OCDE: 47).

Leçon 3 – Les accords officiels aident à créer et renforcer l'engagement politique

Les accords officiels aident à créer et renforcer l'engagement politique, ainsi que le partenariat dans les programmes de réforme. Les accords officiels sont importants pour définir la portée des programmes, le rôle des institutions/organisations partenaires et des parties prenantes locales. Ils renforcent l'engagement politique dans les programmes RSSJ, même en dehors de la portée définie dans les accords. Un mélange d'accords officiels et de diplomatie discrète peut parfois être nécessaire.

Exemples

Soutien des Pays-Bas au programme DSS au Burundi

Le Burundi et les Pays-Bas ont coopéré sur les questions de développement du secteur de la sécurité (DSS) depuis 2004. Cette coopération a été officialisée par un Protocole d'accord signé en 2009 pour soutenir les activités DSS sur une période de huit ans (2009-2017). L'accord politique pose les bases du dialogue entre les gouvernements du Burundi et des Pays-Bas. Il aide à maintenir les discussions politiques pour permettre la mise en œuvre du programme DSS.

Notes

[1] On prétend souvent qu'il n'y a pas de volonté politique de mettre en place des réformes. Cependant, il y a généralement toujours une volonté politique - il s'agit de savoir où elle se concentre et comment l'inciter à se focaliser sur la réforme.